mercredi 18 septembre 2013

Les Amants du Texas : fort et langoureux comme une lampée de bourbon


En salles : Couronné au dernier festival de Sundance, ces Amants du Texas pourraient flirter de prime abord avec la crème du ciné indé US ou bien avec les grands classiques du genre - Bonnie and Clyde, La balade sauvage, Un monde parfait, Nous sommes tous des voleurs… Oui, mais oubliez tout ça ! Car avec son premier film exploité en France, David Lowery impose un style bien à lui, qu’on a hâte de revoir sur les écrans.



Dans le Top 10 des réalisateurs à suivre

Classé par Variety comme l’un des 10 réalisateurs à suivre, le jeune cinéaste s’inscrit dans la lignée des grands cinéastes de l’Américana, d’Altman à Eastwood, en passant par Malick, voire PT. Anderson. Certes, ces deux amants maudits, lui en prison, elle en attente de son retour, pourraient les rapprocher de Bonnie et Clyde, par exemple. Et pourtant, il ne faudrait pas s’arrêter à ces références écrasantes. Car le style Lowery emporte tout.

Le style Lowery

C’est quoi, le style Lowery ? C’est tout d’abord une grammaire qui lui est propre, qui privilégie l’ellipse aux morceaux de bravoure, le fourmillement sonore de la nature texane aux bavardages psychologisants, la lumière nocturne naturelle – quitte même à sous-exposer ses personnages – à l’éclairage diurne. Pour une ambiance tendue, poisseuse, à la lisière du jour et de la nuit, du chien et du loup, du bien et du mal. Un sens aigü du montage parachève le tout, à l’instar des 5 premières minutes qui embrassent à elles seules 4 années d’un seul tenant, braquage et naissance d’enfant compris !

C’est ensuite une attention portée à des personnages parfois mutiques, souvent en proie à leurs erreurs et leurs doutes, noyés dans une existence sans perspectives, uniquement soutenue par l’attente d’un retour, d’un ailleurs ou d’un amour. C’est déchirant comme du Johnny Cash, fort comme une lampée de Jack Daniels, vibrant comme un bon vieux morceau de folk de Woody Guthrie, patronyme porté ironiquement par l’héroïne….Et surtout jamais larmoyant.

Science du casting

C’est enfin une science du casting remarquable. Pour incarner ce couple maudit, uni à l’écran en tout et pour tout 10 minutes (5 au début, 5 à la fin), le choix de David Lowery s’est porté sur les visages à la fois atemporels et juvéniles de Casey Affleck et Rooney Mara. Lui, en hors-la-loi idéaliste, elle en amoureuse déchirée entre sa passion pour son hors-la-loi et ses nouvelles responsabilités maternelles, après L’Assassinat de Jesse James et Millenium, s’imposent tout naturellement dans le sillon initié par Warren Beatty et Faye Dunaway ou Martin Sheen et Sissy Spacek.

Et puis, il ne faudrait pas oublier 3 autres personnages qui gravitent autour du couple d’amants texans :

- Un shérif, blessé par le couple dans les premières minutes, qui développe un amour qui ne veut pas dire son nom pour Rooney Mara. Timide, maladroit, il fait ce qu’il peut à la fois pour se sauver d’une existence triste, et jouer son rôle de représentant de l’ordre. Et en la personne de Ben Foster, il trouve une incarnation idéale.

- La petite fille de 4 ans,

- Enfin, et surtout, un voisin protecteur, incarné par la figure imposante de Keith Carradine. Enorme plaisir de retrouver cet acteur iconique des années 70, vu notamment dans Nashville d’Altman, Duellistes de Ridley Scott, La petite de Louis malle, ou Maria’s Lovers d’Andrei Konchalovsky. Là, dans un rôle digne de Sam Shepard, il imprime durablement la pellicule par sa violence intériorisée et la douceur de sa voix.

Donc, une découverte rare, précieuse, magnétique, du niveau d’un Jeff Nichols (Mud) ou Debra Granik (Winter’s bone), à découvrir immédiatement. Pour patienter avant la suite, The Old man and the Gun, l’odyssée d’un braqueur de banques incarné par Robert Redford.

Travis Bickle


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