mardi 4 février 2014

Philip Seymour Hoffman : retour sur une étonnante carrière


Artistes : L'annonce du décès de Philip Seymour Hoffman a fait l'effet d'une bombe : timelines Twitter et Facebook saturées d'hommages (voir notre hommage en vidéo) et de témoignages incrédules ; notification push sur mobile des principaux médias généralistes... Rarement le décès d'un tel acteur, au succès commercial confidentiel, il faut bien le reconnaître, n'aura suscité autant d'émotion.

Acteur multi-cartes

Lauréat d'un Oscar en 2006 pour le film consacré à Truman Capote, et dans lequel il joue le rôle titre, Philip Seymour Hoffman – PSH pour les intimes ! - aura tout joué : théâtre, cinéma – tous les types de rôle – Capote, donc, mais aussi le critique rock Lester Bangs, le bad guy à patte de lapins de MI3, un travelo, un gourou scientologue, un metteur en scène, un névrosé dostoïevskien... - que ce soit dans des films indés, quelques blockbusters, des films d'auteurs, des drames, des comédies, des thrillers, des études psychologiques, et quelques trip expérimentaux comme le méconnu Synecdoche New York (2011) de Spike Jonze. Son nom restera cependant à jamais lié à celui de son mentor cinématographique Paul Thomas Anderson, avec lequel il tournera 5 films – Boogie Nights, Magnolia, Punchdrunk Love, The Master et Hard Eight, sur le jeu.

Sombre et solaire


Son physique de gros nounours roux le prédisposait à des rôles patelins et bonhommes. Son talent aura été de se tourner vers d'autres contrées, plus ambiguës, plus retorses, plus machiavéliques. S'il ne fallait retenir qu'un seul rôle ? Pour moi, sans hésiter, celui du frère aîné d'Ethan Hawke dans 7h58 ce samedi-là, le dernier film de Sidney Lumet (2008). Composition qui rend justice à toute l'étendue de sa palette d'acteur, versant sombre et destructeur. Auquel j'ajouterais pour faire bonne mesure celui  du Comte, le fameux DJ de Good morning England ! Pour son côté satirique, excentrique et solaire.

Humilité

Et comme c'était un artiste extrêmement intelligent, humble et passionné par son art, plutôt que dresser le Top10 de ses interprétations, voici quelques extraits d'une interview qu'il donne à Positif, à l'occasion de la sortie de son unique film comme réalisateur, Rendez-vous l'été prochain, en janvier 2011 – numéro 599 du mensuel :
- sur son métier d'acteur : "Pour être flexible, soyez préparé !"
- de Sidney Lumet, réalisateur de 7h58 ce samedi-là : Il "m'a appris les bienfaits des répétitions avant le tournage. (…) C'est alors qu'on se sent prêt à prendre plus de risques, à explorer des voies plus surprenantes, voire effrayantes, car on ne se sent en sécurité quoi qu'il arrive".
- Réalisateur en général : "Au cinéma, on a tellement peu de temps qu'on a besoin du réalisateur pour vous dire franchement la vérité, vous pousser à aller de l'avant, vous lancer des défis  (…) L'important est d'arriver au meilleur résultat possible, pas de ménager les susceptibilités".
- Paul Thomas Anderson : "Avant tout, il vous fait sentir que vous prenez part à quelque chose d'important. Cela vous pousse à vous impliquer personnellement. (…) Cela fait 18 ans que nous collaborons. Et nous passons beaucoup de temps ensemble, en dehors du travail. Une amitié précieuse".
- les frères Coen : "Ce dont je me souviens surtout, c'est l'immense plaisir qu'ils ont à regarder les acteurs travailler. (…) Tous les grands cinéastes sont fans des acteurs !"
- Todd Solondz, réalisateur de Happiness (2000) : "Je n'avais pas prévu l'importance que ce film allait avoir dans ma vie ! (…) Je me rappelle avoir auditionné 5 fois Todd Solondz pour décrocher le rôle !"
- Son rôle de travesti dans Personne n'est parfait (2000)  de Joel Schumacher: "Ce fut un immense défi. Qui m'a permis de faire ce dont je me croyais incapable auparavant".
- Synecdoche, New York de Charlie Kaufman (2009) : "Ce film nous dit que tout individu joue dans une pièce : sa vie et sa mort. C'est un sujet puissant".

Sujet puissant qu'a désormais endossé Philip Seymour Hoffman à jamais. So long ! On devrait le revoir prochainement dans A most wanted man, l'adaptation de John Le Carré par Anton Corbijn, aux côtés de Robin Wright
 
Travis Bickle

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