lundi 14 mai 2018

Cannes 2018 : Spike Lee veut-il vraiment exploser Wim Wenders ?

Artistes : Spike Lee vient présenter Blackkklansman en compétition officielle au Festival de Cannes 2018. Un retour sur la Croisette alors qu'il déclare avoir toujours en travers de la gorge que Wim Wenders, président du jury en 1989, n'ait pas attribué la Palme d'or à Do The Right Thing. Et pourtant, le cinéaste américain semblait avoir tourné la page.



"1989 the number another summer", balançait Chuck D en intro de Fight The Power, le morceau vénère de Public Enemy qui ouvre Do The Right Thing (quel générique, mes amis !). 



Ce n'était pas encore l'été à Cannes mais il faisait chaud sur la Croisette. Et Spike Lee y était pour quelque chose tant son film a fait sensation. Sa fraîcheur, sa virtuosité, sa rage emballent les festivaliers, qui font de Do The Right Thing un prétendant sérieux à la Palme d'or. C'est finalement Sexe, mensonges et vidéo de Steven Soderbergh qui obtient le trophée suprême. Pas scandaleux mais Spike Lee est furieux car il a appris que Wenders n'a pas voulu récompenser son film sous prétexte que Mookie, le personnage principal du film qu'interprète Spike Lee, n'était pas assez héroïque. Lee annoncera un peu plus tard qu'il a gravé le nom de l'Allemand sur sa batte de baseball, une Louisville Slugger.


Dans une interview récente à THR, le réalisateur de Do The Right Thing affirme à nouveau qu'il a été "volé" : "Ecoutez, Steven [Soderbergh] et moi, on est cool et on a toujours été cool, explique-t-il. Mais tout ce truc a été commandité par Wim Wenders". Parole à l'accusé, qui n'a pas la même vision des choses : "Il a dit qu'il m'attendrait dans une allée avec une batte de baseball. Et bien, il aurait dû attendre tout le jury car ce n'était pas ma décision, pointe Wenders à THR. Le film n'avait pas le soutien du jury. Ce n'était pas que le film n'est pas bon, il l'est. Il n'a juste pas eu de chance [d'être en compétition] lors d'une grande année. Avec pas seulement Sexe, mensonges et vidéo mais aussi Cinema Paradiso [Giuseppe Tornatore], Un Ange à ma table [Wenders se trompe : le film de Jane Campion était en compétition en 1990] et Pluie noire [Shohei Imamura]. Je n'ai pas pu dormir pendant des nuits à force de repenser à notre décision. Je suis toujours triste que Spike l'ait pris si personnellement".

Apaisement vénitien

C'est en effet étonnant que Spike Lee en ait rajouté une couche avant le Festival de Cannes 2018, d'autant qu'en 2004, il faisait partie du jury de la Mostra de Venise alors qu'un film de Wim Wenders est en compétition. Et il avait déclaré à The Independent qu'il n'y aurait pas de vengeance de sa part : la polémique de 1989 s'était déroulé "il y a longtemps", soulignait-il. Et d'assurer : "Chaque membre du jury est là pour faire son travail au mieux, et nous voulons être impartiaux".

Donc qui faut-il croire ? Le Spike Lee apaisé de 2004 ou le Spike Lee toujours vénère de 2018 ? Il n'est pas impossible que le cinéaste originaire de Brooklyn ait remontré les crocs pour faire un peu de buzz... et/ou faire pression sur le jury. Brother Spike a toujours assumé d'être une grande gueule.

Quoi qu'il en soit, Thierry Frémaux a pris soin de ne pas projeter Blackkklansman le même jour que Le Pape François Un homme de parole, le film de Wim Wenders présenté également à Cannes (mais hors compétition). Deux films produits par Focus Features, la filiale d'Universal. Le studio ou Frémaux parviendra-t-il à leur faire enterrer la batte de guerre ? Cela ferait en tout cas une belle photo en haut des marches.

PS pour les fans : découvrez sur Blink! les souvenirs d'Anthony Barboza, photographe de plateau pour Do The Right Thing

Anderton


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